3 questions à... Thomas Teyssaire, conseiller ordinal et membre du groupe de travail "Accès à la profession"
19 déc 20253 questions à
A l'occasion de la prochaine Journée des Lycéens, un salon d'orientation sur les études d'architecture organisé chaque année par l'Ordre des architectes aux Récollets, le CROAIF a souhaité interrogé Thomas Teyssaire, architecte, conseiller ordinal et membre du groupe de travail "Accès à la la profession" :
La Journée des Lycéens, organisée par le CROAIF, sera pour beaucoup, une première rencontre avec la profession d'architecte. Cette rencontre offre aux lycéens l'opportunité de poser toutes leurs questions aux écoles, aux représentants de l'Ordre présent, à des architectes praticiens. Ces échanges leur permettent de confronter leurs représentations, parfois idéalisées ou stéréotypées, avec les témoignages authentiques et les retours d'expérience des professionnels présents.
La Journée des Lycéens représente un temps fort dans l'engagement de l'Ordre auprès des futurs étudiants. Pour cette occasion unique, l'Ordre se mobilise afin de réunir en un même lieu les sept écoles d'architecture franciliennes – les six ENSA (Écoles Nationales Supérieures d'Architecture) et l'ESA (École Spéciale d'Architecture) – aux côtés d'architectes praticiens, d'architectes du patrimoine et d'ingénieurs-architectes. L'Île-de-France a en effet la particularité d'accueillir sur son territoire cette remarquable diversité d'établissements de formation. Plutôt que de devoir multiplier les déplacements, les lycéens peuvent ainsi découvrir l'ensemble de ces écoles et leurs spécificités pédagogiques lors d'une seule et même journée.
Cette micro "portes ouvertes" sur l'Architecture arrive à un moment stratégique pour ces jeunes en pleine procédure Parcoursup. Elle leur permet de voir concrètement vers quoi débouchent les études d'architecture et de découvrir qu'il existe mille façons d'exercer des métiers en architecture : maîtrise d'œuvre, urbanisme, patrimoine, scénographie, design, recherche, enseignement...Ils n'en ont pas tous conscience à ce moment-là mais c'est un métier très riche aux multiples facette.
Cette belle représentation de la diversité du métier permet également d'informer les lycéens, que la profession d'architecte est réglementée et que son exercice est contrôlé par un Ordre. Celui-ci garantit auprès du public les compétences, l'éthique et la formation continue des professionnels face aux nouveaux enjeux environnementaux, sociétaux et techniques de notre époque.
Notre société traverse des mutations profondes, et la nouvelle génération d'architectes est confrontée à des défis inédits qui appellent une transformation en profondeur de la formation. Si l'Ordre n'a pas vocation à interférer dans la pédagogie des écoles d'architecture, qui relève de leur autonomie, il a néanmoins un rôle d'observation et d'interpellation sur l'adéquation entre les enseignements dispensés et les réalités professionnelles auxquelles seront confrontés les futurs diplômés.
Dans un contexte mondial de raréfaction des ressources et d'urgence climatique, la profession et la société dans son ensemble doivent repenser fondamentalement l'acte de bâtir. Les écoles d'architecture ont la responsabilité de former des étudiants capables de questionner la pertinence de chaque intervention architecturale et d'arbitrer entre construction neuve, réhabilitation, transformation et réemploi de l'existant.
Cette sensibilisation aux enjeux environnementaux doit se traduire concrètement : maîtrise du calcul carbone et de l'analyse du cycle de vie, conception bioclimatique, utilisation de matériaux biosourcés et géosourcés, économie circulaire et réemploi. Les étudiants doivent également être formés au respect de la biodiversité et à l'intégration de la nature en ville, comprenant que l'architecture s'inscrit dans un écosystème global.
Pour relever ces défis, les futurs architectes doivent pouvoir s'appuyer sur une double culture : celle des techniques et savoir-faire d'antan – construction en terre, en pierre, charpentes traditionnelles – qui ont fait leurs preuves en termes de durabilité et de sobriété, mais aussi celle des technologies contemporaines et émergentes.
L'intelligence artificielle constitue à cet égard un défi pédagogique majeur. La formation doit permettre aux étudiants de développer une utilisation critique et éclairée de ces outils : comprendre ce que l'IA peut apporter comme aide à la conception, à l'optimisation énergétique ou à la modélisation, tout en cultivant l'essence même du métier d'architecte – la créativité, la sensibilité, la capacité à concevoir des espaces qui font sens pour leurs usagers. Le dessin à la main, la maquette physique, le rapport tactile aux matériaux demeurent des fondamentaux précieux qui enrichissent la palette d'outils de l'architecte.
Le secteur de la construction traverse actuellement des mutations importantes – évolutions économiques, nouvelles modalités contractuelles, transformation des pratiques professionnelles. La formation doit accompagner cette évolution en préparant les étudiants aux réalités du métier : compréhension des enjeux économiques, maîtrise des différents modes de contractualisation, découverte de la diversité des missions de l'architecte au-delà de la maîtrise d'œuvre traditionnelle.
Cette préparation peut s'enrichir de situations d'apprentissage en conditions réelles : ateliers avec des commanditaires et des budgets concrets, chantiers-écoles, partenariats avec des collectivités. Le développement de compétences entrepreneuriales et la sensibilisation à la diversité des débouchés professionnels – urbanisme, scénographie, patrimoine, recherche, enseignement – élargissent les perspectives d'insertion et renforcent l'adaptabilité des futurs diplômés.
La formation initiale, aussi complète soit-elle, trouve son prolongement naturel dans la formation continue, élément essentiel pour permettre aux architectes en exercice de s'adapter aux évolutions rapides de la profession. C'est par cette approche continue – de la formation initiale à l'accompagnement tout au long de la vie professionnelle – que nous assurons la pérennisation et la pertinence de notre profession face aux enjeux du XXIe siècle.
L'Ordre des architectes d’Ile-de-France est présent dans l’ensemble des CA des ENSA franciliennes, tout en organisant également plusieurs fois par an des réunions des présidents et directeurs de ces écoles franciliennes dans nos locaux. A ce titre, la commission « accès à la profession » agit pour être force de propositions pour accentuer certains pans de la formation initiale des futurs diplômés en architecture. Elle a également entrepris des travaux sur la question de l’apprentissage au sein des ENSA, afin qu’ils puissent prendre connaissance de ce dispositif et des bénéfices de ce dernier. Nous intervenons également par le biais des modules ordinaux directement auprès des élèves en HMONP pour les sensibiliser sur l’action ordinale et leurs futures obligations en tant qu’architecte.
La commission est également attachée à travailler à la diffusion de la culture architecturale auprès de plus jeunes, en appelant à la mise en place d’un dialogue entre les agences d’architecture et les écoles du primaire et du secondaire pour faire naitre de nouvelles vocations. Ces enjeux ont par ailleurs été évoqués sous l’angle de la médiation dans le cadre d’un atelier lors de nos premières Assises franciliennes de l’architecture en 2025, en présence de l’Education nationale.
Thomas Teyssaire, architecte et conseiller ordinal au sein du CROAIF.
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